Il ne faudrait pas se fier au calme apparent de ma petite ville Suisse au bord d’un lac, car l’envers du décor est que la vie nocturne y est bien active, et qu’elle offre un accès facile aux drogues en tous genre.
J’ai commencé à boire de l’alcool et à fumer des joints à partir de l’âge de 15 ans et mes premières pertes de maîtrise n’ont pas tardé. Très rapidement, j’ai fait partie de la Team de ceux qui n’arrivent pas à s’arrêter, de ceux qui poussent le reste du groupe à mettre en pratique le « Toujours plus », de ceux qui veulent essayer de nouvelles drogues, de ceux qui ne se souviennent plus de la manière dont s’est terminé la soirée… Avec toujours en deuxième vague, un sentiment de honte et de culpabilité qui accompagne ces moments de vie volés.
Je suis partie de chez ma mère bien avant ma majorité car l’ambiance familiale était lourde et j’avais besoin de me sentir libre. Cette indépendance précoce, accompagnée d’une consommation abusive, m’a propulsée dans un monde sans limite.
J’ai développé rapidement une attirance prononcée pour la vie nocturne et les drogues « festives », j’ai essayé toutes sortes de produits à la mode (extasy, mdma, speed). Comme je sortais beaucoup, dans les bars et les clubs, avec une consommation d’alcool abusive, l’association avec de la cocaïne s’est imposée progressivement comme une évidence.
Je me suis passionnée pour la musique électronique. Je voyageais dans les grandes villes pour la vie nocturne : visiter les clubs, écouter les meilleurs DJ et consommer « les produits locaux ». J’ai passé des moments incroyablement puissants, d’une intensité maximum, et je recherchais constamment cette sensation. J’ai adoré danser toute la nuit, je ne pouvais plus m’arrêter une fois que j’étais lancée, je continuais à chercher des fêtes et de la drogue, de manière obsessionnelle et compulsive, pour ne pas rentrer chez moi. Pour ne pas sentir ce sentiment profond et douloureux de solitude intense, une fois l’illusion de la nuit, de la foule et des produits retombée. Ma consommation « festive » s’est transformée en obligation de consommer : je n’avais plus de choix. C’était devenu automatique, à chaque sortie, à chaque frustration, à chaque émotion, à chaque excuse ; bref, la dépendance active.
Quand il n’y avait plus rien à faire, je cherchais un homme avec qui rentrer, pour combler le vide. J’étais incapable d’entretenir une relation stable et je préférais me séparer rapidement avant de prendre le risque de m’attacher ou de me faire abandonner. Mon rapport aux hommes était compliqué. Mon pouvoir de séduction, avec lequel je jouais beaucoup pour me donner de la consistance et de l’amour propre à travers les autres, laissait ensuite place à un énorme vide. J’ai connu différentes expériences à travers ces relations ; j’ai été très manipulatrice mais j’ai également été abusée : j’ai donc connu le statut de bourreau mais aussi celui de victime. Il m’a fallu des années pour accepter le second.
Au fil des années, mon manque d’estime aggravait toujours plus mon sentiment d’insécurité. La drogue avait impacté tous les domaines de ma vie : J’avais perdu la maîtrise…..
J’ai mené cette vie de fête et de consommation obsessionnelle et compulsive pendant 15 ans. La souffrance interne et mon état de confusion mentale constant m’ont progressivement poussée à sortir du déni, à prendre conscience de l’ampleur de ma maladie et à avoir le courage de demander de l’aide pour m’occuper de ce problème. Clairement, je voulais me donner une chance de connaître une autre vie, plus authentique et plus sereine, j’avais envie de pouvoir me refaire confiance, j’étais fatiguée de la personne que j’étais devenue. Mais je ne savais pas par quel bout commencer et surtout comment m’y prendre.
Un jour, un copain m’a parlé des cocaïnomanes anonymes et il m’a accompagné à ma première réunion. C’est à partir de ce moment que ma vie à commencer à prendre une autre dimension. La première année de mon rétablissement a été très dure, j’ai dû apprivoiser cette solitude que j’avais passé ma vie à fuir. Admettre mon impuissance m’a demandé de sortir du contrôle et d’accepter mon statut de dépendante. Les émotions et les sales histoires que j’avais refoulées durant toutes ces années sont ressorties ensemble, mélangées, sans me ménager : j’étais terrorisée. J’ai découvert l’ampleur de cette « maladie des émotions » et l’impact qu’elle a eu sur ma vie.
CA et ses membres avaient une solution à m’apporter. Aller en réunion, partager honnêtement, prendre une marraine, travailler mes étapes. Un ami du rétablissement m’a dit un jour « Tu dois aller chercher ton rétablissement avec la même détermination que quand tu allais chercher des produits », ce que j’ai fait. J’ai progressivement repris confiance en moi et appris à me connaître, à me respecter et même à m’aimer. Je n’ai plus besoin d’être dans la séduction pour me rassurer et je n’ai plus besoin de mendier de l’amour autour de moi, puisque je deviens progressivement ma propre source d’amour inconditionnel. Ce travail de fond que j’ai fait à travers les 12 étapes et les différentes thérapies a été douloureux et long, mais il a porté ses fruits. Au final, j’ai compris en terminant mes étapes que prendre du temps pour me rétablir devient un investissement sur du long terme, et que si je suis bien dans ma tête, tout le reste suivra. J’ai pu travailler sur le fond de mon histoire de vie et de ma manière d’être en relation avec les autres.
J’ai compris et accepté que pour que les choses soient moins compliquées avec la majorité des membres de ma famille, je devais garder une distance.
Je suis aujourd’hui en couple depuis plusieurs années et je découvre avec lui ce que veut dire une relation amoureuse enrichissante. Mon couple m’offre aussi l’opportunité de pouvoir continuer à travailler sur moi. Je sais que c’est grâce à ma sobriété, à la mise en lumière et à la libération de mes anciens traumatismes que cela est possible.
Chez cocaïnomanes anonymes, ce sont des dépendants qui aident d’autres dépendants, c’est comme ça que cela marche. Je suis devenue marraine à mon tour et je remercie la vie de m’offrir ce cadeau. Celui de pouvoir expérimenter différents statuts dans mon rétablissement, de passer de filleule à marraine, de glisser de « j’ai besoin d’aide » à « je peux t’offrir mon aide ». Le service rend mon rétablissement solide, il me permet de rendre ce que j’ai reçu et m’aide à sortir toujours un peu plus de mon ego. J’ai réalisé que le vide ne se comble pas efficacement avec des éléments extérieurs, que ce n’est qu’une recherche intérieure et spirituelle qui peut me soulager et me faire ressentir de l’Unité. Le programme me propose différents outils pour apprendre à confier ma vie et à développer ma spiritualité, pour partir à la découverte de ma propre vision de ce qu’est une puissance supérieure. Plus ma Paix intérieure grandit, plus mon sentiment d’insécurité s’évanouit.
Dans ces salles, j’ai rencontré des gens qui ont le même langage, avec lesquels j’arrive à m’identifier car nous avons tous le même désir : se libérer de l’enfer de la consommation et apprendre à vivre une Vie pleine de sens en découvrant qui nous sommes réellement. La magie du partage est réelle et la libération de la parole soigne. J’ai pu expérimenter ce processus et j’en suis convaincue, il existe une solution.
Que je suis fière de faire partie de cette équipe de dépendants en rétablissement, qui viennent de tous horizons et qui se rétablissent jour après jour, avec espoir, foi et courage ! Le tout sans l’illusion des produits, juste avec un cœur ouvert.
Merci à ce programme et à tous ses membres de m’apporter une solution efficace à un problème tenace.